Nous commençons aujourd’hui une nouvelle série sur 1 Corinthiens. Ça fait longtemps que je désire étudier avec vous ce livre. J’ai pris mon temps car je voulais accumuler de la documentation pour m’aider dans la présentation de ces sermons. J’aurais préféré traiter ce livre au cours d’une classe biblique. Mais puisque nous sommes organisés comme nous le sommes, ça n’est pas possible. Nous ferons donc de notre mieux à travers cette série de sermons. Peut-être avant d’entreprendre une étude détaillée du texte, il faut comprendre qui les chrétiens de Corinthe étaient, d’où ils venaient, dans quel contexte ils vivaient, comment la société autour d’eux les influençait. Le savez-vous? Voici quelques questions intéressantes que j’ai trouvées dans un livre sur 1 Corinthiens, comment y répondriez-vous?
L’église de Corinthe fut établie lors du 2e voyage missionnaire de Paul. Ce voyage devait normalement l’amener vers l’Asie et la Bithynie (Actes 16.7), mais à Troas, Paul eut une vision. Un macédonien lui apparut et le supplia de descendre en Macédoine pour secourir son peuple (Actes 16.10). Paul partit donc dans cette direction et établit des églises à Philippe, à Thessalonique et à Bérée. Persécutés par les Juifs de Thessalonique, il fut contraint de fuir vers Athènes, où sa prédication ne fit pas beaucoup de convertis (Actes 17.32-34). Les athéniens étaient trop préoccupés par la philosophie. Ils servaient Athéna, la déesse de la guerre, mais aussi et surtout de la raison, de la prudence, de la sagesse. Elle était par excellence la déesse de l’esprit. Sa statue gigantesque de bronze dominait la ville d’Athènes et « veillait » sur elle. Paul quitta donc cette ville pour se rendre 90 km plus bas, à Corinthe. La déesse Aphrodite était patronne de Corinthe. À l’opposé d’Athéna, Aphrodite était la déesse du corps. Athéna invitait ses fidèles à se concentrer sur les choses de l’esprit. Aphrodite appelait ses adorateurs à se concentrer sur les plaisirs du corps. Corinthe se trouvait à un endroit où la mer avait presque coupé la Grèce en deux, sur une bande de terre qui reliait le continent au Péloponnèse. Cette bande de terre s’appelle l’Isthme. L’Isthme mesure 6 km de large à son point le plus étroit.
I. Pourquoi Corinthe était une ville prospère:
Ce bout de terre était hyper important dans l’Antiquité. Pourquoi? Parce que le commerce entre les grandes puissances se faisait par voie terrestre et maritime. Quels étaient les grands empires à l’époque? Rome, la Grèce, l’Egypte, la Syrie... Et la navigation était rudimentaire à ce temps. Les bateaux n’étaient pas très fiables et la mer au cap Malée était souvent déchaînée (cap qui termine la péninsule d'Epidaure Limira, à l'extrémité méridionale du Péloponnèse. Il sépare le golfe de Laconie, dans la mer Ionienne, de la mer Égée). Les vents, les courants y étaient dangereux. Le plus souvent les commerçants préféraient s’arrêter à Léchée (port à l’ouest de Corinthe) ou à Cenchrées (port à l’est de Corinthe) et faire passer leurs marchandises, voir leurs bateaux (s’ils n’étaient pas trop grands) par la petite bande de terre où se trouvait Corinthe. Les bateaux qui venaient de Rome et qui allaient au moyen Orient arrivaient donc d’un côté ou de l’autre, ils déchargeaient les marchandises et elles étaient tirées par des esclaves, grâce à un système ingénieux, sur un genre de tapis roulant, pour être réembarquées de l’autre côté, sur un autre navire. De grandes quantités de marchandise transitaient donc par Corinthe qui avait une forteresse perchée à 575m sur une colline avoisinante pour s’assurer le contrôle de la voie commerciale. Et la ville levait des taxes sur tout ce qui passait par chez elle. Elle était donc riche. Elle était en plus située dans une région où il y avait d’abondantes sources d’eau, des mines, des carrières de calcaire qui fournissaient une pierre de construction excellente. C’était la troisième ville de Grèce, après Athènes et Parthes. Elle fut pendant longtemps opposée à Athènes et à la tête de la ligue achéenne. Ce qui lui valut d’être totalement rasée lorsque cette ligue s’opposa aux romains. Le général Mummius la réduisit en cendre en 146 avant Jésus-Christ.
C’est Julius César qui décida de la rebâtir cent ans plus tard (en 44 ACN), non pas en tant que ville grecque, mais en tant que colonie romaine. Une colonie romaine était un lieu qui devait servir pour répandre la culture romaine dans les territoires conquis. Pour y parvenir, les empereurs y envoyaient les militaires retraités. Ces derniers étaient récompensés avec des parcelles de terre dans les colonies et pouvaient y aménager avec leurs familles et esclaves. Ça n’a pas mis longtemps pour Corinthe de renaître de ses cendres et devenir à nouveau célèbre. Elle devint la capitale de la province d’Achaïe. À cause de sa position et sa prospérité, elle attirait toutes sortes d’artisans, de marchands, d’aventuriers, de voyageurs, de diplomates. On la considérait comme le troisième centre bancaire de la Grèce. Le futur était prometteur pour tous les fonctionnaires ambitieux qui venaient s’y établir. Toutes les occasions de grimper l’échelle sociale se trouvaient réunies dans cette ville. C’était un endroit où toutes les cultures se croisaient. Beaucoup de juifs y vivaient. Elle était également pleine de marins. La ville comptait 500,000 habitants. Sa population était hétéroclite.
II. Les conséquences de cette prospérité sur la morale et la culture des Corinthiens:
Et quand il y a des marins, des militaires, des aventuriers, des politiciens, de l’argent, que trouve-t-on également? La débauche. Corinthe était réputée pour sa grande dépravation, même dans les villes où la décadence était déjà importante. Selon les écrivains de l’époque, c’était le lieu où les grecs, les romains, les syriens, les asiatiques, les égyptiens et les juifs travaillaient, faisaient du commerce, se querellaient et « frayaient » comme nul part ailleurs en Grèce.
Écoutez ces descriptions données par des théologiens et historiens: « Tous cherchaient à percer et à grimper sans aucune considération pour la prudence. Les marchands ne reculaient devant rien pour faire plus de profits, ceux qui recherchaient le plaisir s’abandonnaient à tous genres de convoitises, les athlètes fiers de leur force et capacités ne pensaient qu’à améliorer leurs performances peu importe les moyens. À Corinthe, personne ne reconnaissait qu’un autre était son supérieur et aucune loi n’importait autant que celle de faire ce qu’on voulait personnellement. » (Morris)
Erdman ajoute: « Corinthe était une ville commerciale, mais les gens étaient cultivés. Il y avait de nombreuses écoles et des groupes de discussions étaient organisés un peu partout. On pouvait y étudier la rhétorique et la philosophie. »
D’après Robertson, la nouvelle ville de Corinthe était le paillasson sur lequel les étrangers venaient s’essuyer les pieds avant d’entrer dans le pays enchanté de la Grèce.
Le mot Corinthe selon Barclay était un synonyme de vie immorale. Le terme « Korinthiazesthai » était entré dans le « dictionnaire »(registre linguistique) des gens de l’époque. Il signifiait vivre dans la débauche, comme un ivrogne.
Aelien, un auteur grec de l’antiquité nous dit que lorsqu’un corinthien était représenté sur scène dans une pièce de théâtre, il était toujours dépeint comme quelqu’un de ivre.
III. Les dieux protecteurs de Corinthe:
Mais par dessus tout, Corinthe était connu dans le monde entier à l’époque à cause du temple d’Aphrodite qui était situé sur le somment d’une montagne avoisinante (Acropolis). 1000 prêtresses y vivaient et descendaient chaque soir sur la ville pour s’y prostituer. Ces femmes faisaient tellement rêver les marins qu’ils disaient: « N’importe quel homme ne peut se payer un voyage à Corinthe ». Ça devint même un proverbe. Aristophanes nous laisse savoir dans ses écrits, que lorsqu’on voulait désigner une femme comme une prostituée, on disait une femme de Corinthe. Corinthe était réputée dans le monde entier pour ses vices. On y adorait Aphrodite, mais aussi Poséidon le dieu de la mer (de qui les gens de Corinthe tirait une grande partie de leur richesse), Mélicerte le patron des marins et Apollon et encore beaucoup d’autres (c’est pourquoi Paul disait que les corinthiens adoraient de nombreuses divinités en 1 Co 8.5).
IV. Les deux vices qui rongeaient Corinthe:
Les deux vices qui rongeaient donc le plus Corinthe était l’avidité et la luxure (ou la cupidité et la convoitise sexuelle, pour le dire encore plus simplement l'amour du sexe et de l'argent). Dans cette ville où les marchandises et les titres de propriété changeaient régulièrement de main, où les arnaques et l’escroquerie étaient monnaies courantes, où des contrats étaient rédigés et annulés constamment, il y avait éternellement des procès et des actions en justice. Pas étonnant que les frères et sœurs avaient facilement tendance à recourir à ces instances pour résoudre leurs différends les uns avec les autres (1 Corinthiens 6.1).
V. Les jeux isthmiques:
Que dire d’autre sur Corinthe? C’était la ville où les jeux isthmiques étaient organisés tous les deux ans. Ces jeux étaient organisés en l’honneur du dieu Poséidon. Ils demandaient de la discipline physique et de la concentration d’esprit. Les candidats devaient s’abstenir de toute une série de choses pendant dix mois pour avoir le droit d’y participer (p.8). Ils devaient prouver qu’ils maîtrisaient parfaitement leurs corps. Nous en reparlerons plus tard, car Paul fera une analogie dans sa lettre entre la vie chrétienne qu’il convient de mener et les athlètes qui s’imposent toute sorte d’abstinences pour gagner la récompense suprême (1 Co 9.24-27).
Conclusion:
C’est donc dans ce genre de ville là que Paul se rendit après avoir essuyé un échec à Athènes. Pensez-vous que l’évangile eut plus de succès en ce lieu que dans la capitale? Et bien lisons ensemble le 18e chapitre des Actes, du verset 1 à 18 et trouvons la réponse: « … » Oui, cette ville fut réceptive à l’évangile, car c’est souvent dans les bas fonds qu’un homme se tourne vers le ciel pour trouver quelque chose de meilleur pour sa vie. Et peut-être aujourd’hui, c’est pour cette raison que vous et moi nous sommes en France à Strasbourg. Parce que Dieu a un peuple nombreux dans cette ville et nous devons les ramener à lui. Est-ce que ça sera facile? Je ne pense pas. Tout comme Paul nous serons rejetés à cause de notre mission. Mais Dieu sera avec nous si nous osons parler. Peut-être ça prendra du temps. Paul dut passer un an et demi pour trouver le peuple de Dieu dans cette ville.
Et peu après son départ de Corinthe, Dieu envoya un autre pour continuer son oeuvre dans cette ville. Regardez en Actes 18.23-19.1: « … » Qui était celui qui continua le travail de moisson dans le champ du Seigneur en Achaïe? Apollos. Pourquoi Ananias l’encouragea-t-il à monter vers Corinthe et lui donna-t-il des lettres de recommandation pour y être accueilli? Pourquoi le Seigneur dirigea-t-il ce serviteur en particulier vers Corinthe? Je pense que c’est parce qu’Apollos était un de ses prédicateurs les plus doués et qu’il savait qu’il fallait des travailleurs exceptionnels pour y faire une différence.
Frères et soeurs, je dois vous avouer qu’aujourd’hui le champ missionnaire reçoit souvent les moins doués de nos évangélistes. Si un jour vous voyagez aux USA, vous le constaterez, vous verrez que là se trouvent souvent les plus doués de nos frères. Ils ont plus de talents dans leur petit doigt que moi dans tout mon être. Pourquoi sont-ils là et moi ici?
Il y a deux manières de répondre à cette question: